Simon Pagenaud, vainqueur des 500 miles d’Indianapolis, et Sébastien Buemi, ancien pilote de F1 et quadruple vainqueur des 24h du Mans, nous parlent des épreuves de la Triple couronne
Disputés en mai et juin, le GP de Formule 1 de Monaco, les 500 miles d’Indianapolis et les 24h du Mans sont sans doute les trois courses les plus prestigieuses du sport automobile. Pour un pilote, remporter ces épreuves c’est remporter aussi la très convoitée Triple Couronne. Dans l’histoire du sport auto, un seul pilote la détient, il s’agit du britannique Graham Hill ! Il l’a décroché en 1972, après avoir gagné les 24h du Mans aux côtés d’Henri Pescarolo, à bord de la Matra Simaca MS670. D’autres ont déjà gagné l’une de ces trois épreuves. C’est le cas du Français Simon Pagenaud, vainqueur des 500 miles d’Indianapolis en 2019 avec Penske, et du Suisse Sébastien Buemi, quatre victoires aux 24h du Mans en Hypercar avec Toyota. Ils ont tous les deux répondu à nos questions.
Triple couronne, Monaco, Indianapolis et Le Mans : « c’est un petit peu la fête de l’automobile » assure Simon Pagenaud
Pour le pilote Simon Pagenaud, les épreuves de la Triple couronne, qui s’inscrivent dans une période intense et riche en événement, « c’est un petit peu la fête de l’automobile. C’est la saison qui bat son plein. C’est vraiment la partie importante de l’année pour le sport auto ».
Au sujet des 500 miles d’Indianapolis, il ne manque pas de superlatifs : « Aux USA, c’est l’événement de l’année et il n’y a que la victoire qui compte. C’est vraiment une course à part où on a encore l’impression d’être des vrais gladiateurs quand on y participe. C’est un événement incroyable qui donne des frissons rien que d’y penser. »
Simon Pagenaud poursuit : « On est là-bas pour établir des records de vitesse. C’est la course la plus rapide au monde sur un ovale, qui est une catégorie très atypique. Avec un regroupement de supporters de tous les coins du monde, c’est vraiment un privilège d’y participer. » Le Poitevin est clairement entré dans la légende en remportant l’épreuve américaine 99 ans après le français Gaston Chevrolet en 1920. Il est très fier de cette reconnaissance, « surtout aux Etats-Unis, c’est clair. Parce que ça m’a fait entrer dans une autre dimension au niveau de la société. Pas seulement qu’en sport automobile ». Il est également surpris de l’engouement que ça a suscité en France et de sa popularité.
Simon Pagenaud : « Au Mans, pendant 24 h, les émotions sont repoussées à la limite »
Simon Pagenaud a pu mesurer sa popularité lors de son retour aux 24 Heures du Mans, l’an passé, après douze ans d’absence. Le pilote de 40 ans confie même qu’il a été « ému aux larmes » en voyant tout ce soutien.
Toujours à propos des 24h du Mans, Simon Pagenaud met en avant l’Automobile Club de l’Ouest, l’organisateur, « qui fait un boulot monstre pour que ce soit un événement français et surtout international, chaque année. On sait tous que c’est mi-juin, il n’y a pas de doute là-dessus ». Il n’hésite pas non plus à souligner le prestige de cette course, et son importance pour les constructeurs. « Au Mans, on parle plus des marques que des pilotes. Pour elles, cette compétition, purement auto, est une vrai façon de s’exprimer. On peut penser à Porsche, Toyota, Ferrari, Peugeot, Ford ou Chevrolet. »
Il insiste aussi sur la notion de partage durant les 24h du Mans. « Pour moi, ce qui est beau, c’est qu’on est pendant une bonne semaine, tous en équipe. On respire le Mans et on ne sort pas du circuit. C’est une expérience extraordinaire avec toute l’équipe. Et, sur 24 heures, les émotions sont repoussées à la limite. Surtout, que la fatigue les accroît encore plus. » Au-delà de ça, celui qui est passé tout près de la victoire avec Peugeot en 2011 (2e en LMP1), trouve des similitudes avec le circuit américain.
Triple couronne, Indianapolis et Le Mans, « deux pistes qui sont des monuments, presque des monuments vivants »
Selon lui, malgré deux cultures très différentes, la passion est la même. « Il n’y a aucun doute là-dessus, et l’ambiance est similaire. C’est chouette de voir que le sport auto rassemble autant les gens. »
Simon Pagenaud va même encore plus loin au sujet de ces deux épreuves de la Triple couronne : « Ces deux pistes sont des monuments, presque des monuments vivants. On ressent une espèce d’aura. C’est assez extraordinaire. Quand on vient sur ces pistes-là et qu’il n’y a personne, en dehors des événements sportifs, on ressent ce qu’il s’est passé. Et ça, on ne le ressent pas sur d’autres circuits. »
Simon Pagenaud et Sébastien Buemi, objectif 24h du Mans
Non engagé aux 24h du Mans cette année, Simon Pagenaud, espère toujours accrocher cette course à son tableau de chasse, déjà impressionnant. « J’ai remporté les 500 miles, le championnat d’Indycar, les 24 heures de Daytona deux fois. Mais aussi le petit Le Mans à Atlanta, et les 1000 km de Spa. C’est la seule qui me manque. » Simon pense encore en être capable : « Niveau performance, je pense qu’il n’y a aucun souci. Surtout si je suis dans une bonne équipe, avec de bons coéquipiers. »
De l’autre côté, Sébastien Buemi sera bien présent aux 24h du Mans 2024. Le pilote suisse, dont ce sera la treizième participation dans quelques jours (15-16 juin 2024), s’est déjà imposé quatre fois dans la Sarthe, en 2018, 2019, 2020 et 2022. Il faut ajouter à ça cinq podiums, dont une deuxième place derrière Ferrari l’an passé. Même après toutes ces années, Sébastien Buemi est toujours aussi fier de participer aux 24h du Mans. « Le Mans c’est incroyable. Et c’est surtout un honneur de pouvoir rouler dans une équipe comme Toyota parce que c’est une équipe avec laquelle je peux me battre pour la victoire. Ça génère un petit peu plus de pression, mais je suis très content d’être là et j’essaie de profiter à fond. »
Triple couronne, Le Mans : « la course la plus importante de l’année » insiste Sébastien Buemi
Pour le pilote Sébastien Buemi, « c’est peut-être la course la plus importante de l’année. En fait c’est une course atypique. Elle est mythique, difficile. Quand on la gagne, c’est quand même un sentiment exceptionnel. Et chaque fois qu’on l’a fait on réalise à quel point c’est tellement difficile de la gagner. Puis, avoir réussi à le faire quatre fois, c’est quelque chose d’assez incroyable ».
En outre, il y a un autre « événement spécial », pour le Suisse, qui se déroule avant Indianapolis et Le Mans. Il s’agit évidemment d’une autre épreuve de la Triple couronne, le Grand Prix de Formule 1 de Monaco.
Disputer le Grand Prix de F1 de Monaco et « Se pincer pour réaliser que ce n’est pas un rêve » sourit Sébastien Buemi
Au sein de l’écurie italienne Toro Rosso, il a eu la chance de disputer une autre course qui compte pour la Triple couronne. Sébastien Buemi a participé au Grand prix de Monaco à trois reprises, en 2009, 2010 et 2011. De ces trois éditions, il en garde évidemment de très bons souvenirs. « C’est un événement incroyable avec une ferveur tout autour du circuit. Ça reste un sentiment assez difficile à décrire, spécial. » Sébastien poursuit : « Quand vous montez le casino et que vous redescendez sur Mirabeau, puis le tunnel… Ce sont des endroits dont j’ai rêvé, petit, de pouvoir y rouler un jour en tant que pilote. Et c’est vrai qu’une fois qu’on y est, on doit se pincer pour réaliser que ce n’est pas un rêve. »
Comme Simon Pagenaud, Sébastien Buemi place Monaco à hauteur d’Indianapolis et du Mans, comme le sous-entend la Triple couronne. Il affirme que ce sont « les trois courses les plus importantes de l’année. Comme on a vraiment envie d’y briller, on se met plus de pression. Et si ça se passe mal, il faut attendre un an avant d’avoir une nouvelle opportunité. Mais on ne sait pas non plus si on va l’avoir, parce qu’il y a tellement de choses qui peuvent se dérouler d’ici là ». Concernant les 24h, le pilote suisse compte bien regoûter au succès dans quelques jours. Et ainsi relancer un début de saison qui n’est pas à la hauteur des espérances.
Triple couronne, 24h du Mans : Buemi et Toyota ont l’expérience pour aller chercher un nouveau succès
« On a été un petit peu malmené, il faut quand même l’admettre. » Dans la Sarthe, il espère que les choses se dérouleront autrement : « C’est une piste qu’on connaît bien. On va essayer de s’adapter, de ne pas faire d’erreurs. Et surtout de mettre notre expérience et notre vitesse à profit. » Surtout, on le sait, tous les ans, cette épreuve peut rebattre les cartes. « Ici, ça compte double. C’est vrai qu‘un très bon Le Mans peut totalement vous remettre dans le jeu au championnat. Et un très mauvais peut vous mettre hors-jeu quasiment aussi, donc c’est à double tranchant. »
Mais pour Sébastien Buemi et l’écurie japonaise, l’objectif est bien clair : « On ne pense pas forcément au championnat. Il n’y a qu’une chose qui compte, c’est de gagner la course. C’est normal pour nous de se battre pour la victoire. Après, bien entendu, si on n’arrive pas à s’imposer, on pensera au maximum de points qu’on va réussir à prendre. Mais en tout cas, voilà, j’espère que tout le travail qu’on a fait cet hiver paiera. » Encore une fois, cette année, la concurrence s’annonce nombreuse et rude. On peut notamment citer Porsche, Ferrari, qui engagent pas moins de trois voitures, ou encore BMW, Cadillac ou Peugeot.
Il s’estime tout de même heureux de rouler en Hypercar dans cette période assez incroyable pour la catégorie et de se battre « contre autant de concurrents. Certes, c’est plus difficile, mais ça rend la victoire plus belle aussi. ». Sébastien Buemi conclut : « J’essaie de ne pas focaliser sur le fait qu’il y ait beaucoup de monde. Peu importe si on se bat contre 5, 10 ou 15 voitures, on va se focaliser sur nous, sur notre performance et c’est tout. »
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