Tous les secrets de l’Alpine Alpenglow Hy6, la supercar à l’hydrogène, avec David Praschl, pilote d’essai et mise au point
À chaque sortie publique, c’est le même engouement. Présentée pour la première fois au Mondial de l’Auto 2022, l’Alpine Alpenglow est un show car disposant d’un moteur thermique alimenté à l’hydrogène. Ce véhicule a d’abord été équipé d’un 4 cylindres, Hy4, avant de recevoir en 2024 un V6 de 3,5 litres, Alpenglow Hy6, développant pas moins de 740 chevaux !
L’Alpine Alpenglow Hy6 sur les plus beaux circuits
Dans sa nouvelle version l’Alpine Alpenglow Hy6, prototype conciliant innovation et sportivité décarbonée, a effectué ses premiers roulages publics en 2025. Le public a pu admirer la supercar en marge des 6H de Spa, troisième manche du championnat du monde d’Endurance, aux 24H du Mans et plus récemment au Festival of Speed de Goodwood.

À son volant, à chaque fois, on retrouvait David Praschl, pilote d’essai et mise au point pour le constructeur français. Peu après son roulage en Angleterre, il nous a accordé une interview afin de nous expliquer plus en détails les sensations ressenties à son volant, le fonctionnement si particulier de son moteur thermique à hydrogène et les innovations développées autour de cette voiture de tous les superlatifs.
L’Alpine Alpenglow Hy6, cette œuvre d’art
« Tout le monde rêve de monter dans une voiture comme ça. Quand on sait qu’elle fait maintenant 740 ch, c’est encore plus impressionnant et excitant », affirme David Praschl, pilote de l’Alpine Alpenglow Hy6.


« Ce qui est super, c’est de voir (depuis l’extérieur, Ndlr.) le moteur avec sa tubulure d’admission : c’est une œuvre d’art. Je trouve ça bluffant. Puis on est dans une position de conduite d’une voiture type monoplace. On est dans l’univers du karting, à ras du sol. Ça permet aussi de décupler toutes les sensations quand on roule à haute vitesse. »
Patinage à plus de 200 km/h : il pilote l’Alpine Alpenglow Hy6
Outre la mélodie très sonore qu’il procure, quelles sont les spécificités de ce moteur si innovant, et non moins performant ? La première chose, c’est « qu’on lui injecte de l’hydrogène gazeux via les injecteurs ». Ainsi, le pilote essayeur précise que ce bloc dispose d’une chambre de combustion spécifique « puisqu’on injecte parallèlement au piston, au lieu d’un moteur classique où on injecte par le dessus ».
David Praschl se rappelle très bien des premières sensations au volant de cette Alpine Alpenglow Hy6. « Le plus impressionnant était la transition entre le 4 cylindres et le 6 cylindres avec sa conception vraiment faite pour l’hydrogène. Il y avait un écart de puissance énorme. »
Bluffé par l’accélération, il se rappelle « du patinage à plus de 200 km/h en 5e. Déjà ça clarifie le terrain de jeu. On se dit : « là, on a passé un step et ça marche vraiment » ».
Un moteur à hydrogène pour toujours plus de puissance
Selon lui, la principale difficulté avec cette motorisation, c’est de maintenir la bonne pression, à savoir 40 bars, dans la rampe d’injection pour « avoir le meilleur agrément ». « Ça a été un gros travail de mise au point, de fiabilité, pour ne pas laisser échapper de l’hydrogène pour rien ».

En outre, en termes de performance, David Praschl assure que ce moteur est très bien né. « C’est toujours un compromis entre puissance maximum et couple à bas régime. D’après l’équipe d’ingénieurs, on arrive à tirer plus de puissance d’un moteur hydrogène que d’un bloc essence classique ».
Tout en ajoutant que celui-ci a été placé dans l’Alpenglow, une « très belle voiture qui est d’abord un objet de design et pourrait donc largement évoluer en termes d’aérodynamique et de comportement ».
Le pilote de l’Alpine Alpenglow Hy6 prend 330 km/h dans la ligne droite des Hunaudières
Piloter ce prototype futuriste et innovant sur les circuits les plus mythiques ne le laisse pas de marbre. David Praschl conforme : « C’est une fierté de montrer au grand public cette voiture faite par toutes les équipes d’Alpine, tous leurs fournisseurs et partenaires. C’est super de partager, discuter avec les gens. On voit que la voiture plaît, elle est adoubée par tout le monde. Personnellement, pouvoir rouler au Mans dans une telle voiture, emmener des personnalités, c’est énorme. »

Ainsi, la quintessence pour un pilote amateur comme lui, c’est « de pouvoir prendre plus de 300 km/h dans la ligne droite des Hunaudières : on a pris 330. C’était magique ». C’est tout simplement son souvenir le plus mémorable depuis qu’il prend en mains cette Alpine Alpenglow Hy6.
« Ce n’est que du bonheur de présenter la voiture, de la rouler. On se fait plaisir à chaque fois qu’on monte à bord. »
« Ce n’est pas la performance qui prime, mais la sécurité »
Dans le groupe Renault depuis plus d’une dizaine d’années, et aujourd’hui pilote d’essai et mise au point pour Alpine Cars, David Praschl nous explique comment il s’est retrouvé en charge de ce concept à hydrogène : « On est deux pilotes, donc on se partage les projets. Notre métier de base, c’est la mise au point, et dans la mise au point, ce n’est pas la performance qui prime, mais la sécurité », détaille-t-il.

« On est là pour mettre en adéquation la sécurité du véhicule avec les essais qu’on fait, sans chercher à battre des chronos. On n’a rien à prouver, on est pilotes de développement maison, donc c’est un gage de sécurité de ne pas mettre un nouveau pilote qui voudrait en faire un peu trop. »
Piloter l’Alpine Alpenglow Hy6 : priorité fiabilité
Avec l’Alpine Alpenglow Hy6, il n’y a pas de sortie « pour rien ». David Praschl détaille alors quelles sont ses tâches principales : « On vérifie que tout s’est bien passé, qu’on n’a pas senti de problème d’agrément moteur. Où est-ce qu’on ressent la puissance, comment elle arrive. Ensuite, on travaille sur des parties précises : la boîte de vitesses, le rétrogradage, les montées ou descentes de rapports. Je fais des retours là-dessus. »



Mais ce n’est pas tout : « Parfois, on fait des tests de stabilité, ou bien 200 kilomètres juste pour vérifier la fiabilité. Dans ces cas-là, on est un peu moins focus sur les détails, mais toujours attentif au moindre bruit, au moindre changement d’agrément, parce que ça aide les ingénieurs à retrouver les causes après coup. »
Un pilote d’essai donne son avis sur chaque item
A propos des ingénieurs, le pilote indique qu’avec les équipes d’Alpine Racing, il y a un plan d’essai détaillé qui doit être suivi point par point. Son rôle est de donner un avis sur chaque item. « À la fin, on discute des éventuelles améliorations qu’on aurait pu oublier ».
Logiquement, son dernier retour en date concernant l’Alpenglow Hy6 remonte à Goodwood, mi-juillet. Forcément, il est très précis : « On avait mis un embrayage centrifuge pour simplifier la conception. Mais on s’est dit que pour un départ type course de côte, il aurait mieux valu un embrayage mécanique. On a aussi évoqué l’idée de raccourcir la première vitesse, pour la rendre un peu plus courte. » Ainsi, ce sont des petits détails. Mais, mis bout à bout, ils améliorent l’ensemble.
Au quotidien, auprès des équipes d’Alpine Cars cette fois, il a un peu plus d’interaction avec le bureau d’études . « Quand je veux développer une pièce, j’ai plus de marge pour demander ou proposer des modifications ».
Il pilote l’Alpine Alpenglow Hy6 pour exploiter au mieux le moteur
Même si cela reste encore une « une voiture-laboratoire pour le moteur, et un objet de design », le développement de l’Alpine Alpenglow se fait sans cesse et David Praschl sait déjà ce qui l’attend dans les prochaines semaines.
« On prépare une évolution châssis pour pouvoir monter des pneus plus performants. Mais ce n’est pas simple, car ça demande de modifier certains éléments de suspension. L’objectif, c’est d’exploiter au mieux le moteur », affirme-t-il.


« On a aussi d’autres choses à développer, comme le traction control. On est toujours en train de chercher la performance idéale, de tirer le meilleur parti de ce qu’on a. »
Prochaine étape : une Alpine Alpenglow à hydrogène liquide
Le pilote d’essai et mise au point en vient alors à évoquer le sport automobile, dont l’hydrogène pourrait bien être la technologie d’avenir. « Il y a un fort engouement, de nous, de la FIA, même de l’ACO, pour que des voitures à hydrogène courent en compétition. Mais il reste un cap technologique à passer : l’endurance. L’objectif, c’est de faire plus de 10 tours au Mans ». Justement, selon lui, la prochaine étape importante pour l’Alpenglow sera « d’avoir un réservoir d’hydrogène liquide ».

Passer à l’hydrogène liquide pourrait révolutionner le concept. En effet, « ça permet d’emporter plus de carburant. Il faudra le transformer en hydrogène en gazeux à 40 bars pour alimenter notre moteur. C’est ce sur quoi Alpine Racing travaille. C’est complexe, et ça explique pourquoi ça prend du temps à transposer en course », avoue David.
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